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Hélène Parent et Matthieu Grollemund, le duo faiseur de licornes

Corporate Finance – 11 janvier 2023

Au sein du cabinet Hogan Lovells, ils ont joué un rôle clef lors de 21 opérations de plus d’un milliard d’euros réalisées au cours de ces dernières années

Hélène Parent et Matthieu Grollemund, cabinet Hogan Lovells

Un homme et une femme, une seule vision commune. Ces deux experts du droit, qui murmurent à l’oreille des plus grands dirigeants d’entreprise, exercent avenue Matignon, dans l’une des grandes maisons de la place parisienne, Hogan Lovells, après 10 années passées à l’international. Matthieu Grollemund sur les terres anglo-saxonnes, à Londres et New York, et Hélène Parent sur les terres ibériques, à Madrid. Après une formation à l’ESCP-Europe en 1995, puis à la Sorbonne, Matthieu Grollemund a démarré sa carrière chez Freshfields à Paris et à Londres en 1997, avant de rejoindre le cabinet de conseil McKinsey en 2001. À cette période, il joue un rôle stratégique aux côtés de ses clients, principalement des industriels et fonds d’investissement, sur de grandes opérations et manœuvres de rapprochement dans le secteur des télécoms. Une position qu’il quittera trois années plus tard pour aiguiser ses armes chez Paul Hastings à New York. Il y restera durant sept ans, cumulant ainsi des dossiers de private equity et de tech, avant de rejoindre le cabinet Orrick en 2009. Et c’est le lieu de la grande rencontre avec celle qui complétera parfaitement ce duo de deals makers.

Hélène Parent fait pour sa part ses classes sur les bancs de la faculté de droit de Nanterre et de Queen Mary University of London, passe le barreau à Madrid et à Paris en 2011, avant de rejoindre le cabinet Orrick la même année. Ils rejoindront ensuite les rangs du cabinet Dechert dès 2013. Ils y resteront ensemble durant 4 années, avant de poursuivre chez Baker & McKenzie, pour enfin arriver chez Hogan Lovells en 2021, où ils exercent actuellement en qualité d’associés au département Corporate-Private Equity. Au cours de ces nombreuses années, ils formeront une équipe de huit collaborateurs “fidèles”, tous issus de Baker & Mc Kenzie, et formés aux meilleures techniques juridiques et de négociation. Cette expérience de l’international, cette approche fine des dossiers complexes leur permettent de se hisser à un autre niveau, dans un environnement d’affaires fortement concurrentiel.

Leur terrain de jeu : les licornes

Très vite, les grands fonds américains, attirés par le marché européen et son écosystème tech, les sollicitent. Le marché français leur tend les bras et la start-up Ledger, qui boucle une Série C de 430 millions de dollars en 2021, s’appuie sur eux pour manœuvrer ce tour de table stratégique permettant le développement de ses activités basées sur les crypto-actifs. C’est ensuite le tour d’Ynsect, pour 450 millions de dollars, puis Exotec, pour une levée de fonds de 350 millions d’euros en Série D, ou encore la plateforme de NFT Sorare, pour 580 millions de dollars obtenus auprès des fonds Soft Bank, Atomico, Bessemer, Eurazeo et Accel.

“En private equity pas moins de 4 milliards levés en seulement 18 mois. Leur secret ? Un portefeuille clients constitué de longue date et une capacité à concilier les intérêts de l’ensemble des parties, avec une prédominance pour les acteurs de la tech – fintech, insur’tech, medtech ou encore life science”

Hélène Parent et Matthieu Grollemund augmentent leur volume d’affaires de manière pléthorique en private equity avec pas moins de 4 milliards levés en seulement 18 mois. Leur secret ? Un portefeuille clients constitué de longue date et une capacité à concilier les intérêts de l’ensemble des parties, fonds d’investissement et fondateurs de sociétés en forte croissance, avec une prédominance pour les acteurs de la tech – fintech, insur’tech, medtech ou encore life science. Au sortir de leurs mains, ces entreprises atteignent le grade de licornes, et des valorisations records : 5,8 milliards d’euros pour Doctolib ou encore 2 milliards de dollars pour Exotec, qui devient de facto la première licorne industrielle française.

Leur force : une complémentarité transactionnelle

Dans cet écosystème composé de nombreux cabinets d’affaires dédiés au private equity, le duo tire sa force dans la complémentarité de chacun : si Hélène Parent apporte son regard aiguisé sur de nombreux aspects techniques et pacifie les situations tendues, Matthieu Grollemund, lui, conduit les dossiers avec une approche orientée business, et maîtrise les techniques juridiques anglo-saxonnes et les codes des fonds américains. Ensemble, ils comprennent les sous-jacents des opérations, et ces dualités transactionnelles leur permettent de closer des deals de plusieurs milliards de dollars, le plus souvent avec des solutions innovantes. “Le plus important pour concrétiser un deal est de savoir conseiller des entreprises en forte croissance, avec une prise de risque mesurée, en trouvant le juste équilibre entre des perspectives pas encore matures et une future vision prometteuse”, précise Matthieu Grollemund.

“Le plus important pour concrétiser un deal est de savoir conseiller des entreprises en forte croissance, avec une prise de risque mesurée, en trouvant le juste équilibre entre des perspectives pas encore matures et une future vision prometteuse”

Et bien sûr, de comprendre le business model de chaque société et son potentiel futur car bien souvent, ces entreprises technologiques sont valorisées à plus d’un milliard, mais sans toutefois dégager de cash-flow suffisant. Seuls les grands fonds français ou internationaux, tels que les fonds asiatiques et anglo-saxons, plus enclins à la prise de risques, peuvent comprendre cette approche de marché et miser sur l’avenir, malgré un contexte géopolitique et économique plus qu’incertain. Au-delà de ces conseils stratégiques, la complexité et la sophistication de certains montages, leur ont valu une reconnaissance de Chambers Global (voir encart).

Marché du private equity, vers un rebond en fin d’année ?

Il y a encore quelques mois, les capitaux étrangers abondaient sur la place parisienne en quête d’une cible technologique à fort potentiel de croissance. Au cours des 11 premiers mois de l’année 2021, les sociétés de capital-investissement ont conclu plus de 13 000 transactions dans le monde, pour une valeur totale de 1 800 milliards de dollars, et les sociétés de capital-investissement ont levé 1 100 milliards de dollars auprès des investisseurs en 2022, un record. “Il y avait beaucoup de capitaux disponibles à ce moment et il était plus facile de lever de grosses sommes”, analyse Matthieu Grollemund.

“Les investisseurs étrangers sont toujours attirés par notre écosystème innovant. En revanche, ils mettent plus de temps pour prendre des décisions et se posent davantage de questions, notamment sur les prix et valorisations”

Puis la forte baisse des valeurs tech sur le Nasdaq, la guerre en Ukraine, le contexte inflationniste, tout ceci a contribué à ralentir le niveau de transactions d’antan.

“Les investisseurs étrangers sont toujours attirés par notre écosystème innovant. En revanche, ils mettent plus de temps pour prendre des décisions et se posent davantage de questions, notamment sur les prix et valorisations” selon Matthieu Grollemund.

Ce qui a ralenti le nombre d’opérations en equity réalisées au second semestre 2022. Les montants également ont diminué, car il y a moins de financements disponibles, et un recours plus systématique aux produits de type obligataires, nettement plus sécurisés par des garanties, des sûretés ou des bons de souscriptions. “Nous constatons davantage d’opérations d’opportunités et de build’up…” ajoute Hélène Parent.

Les choses devraient bouger d’ici à la fin de l’année. Selon ces experts, au sortir de la période estivale latente, certaines entreprises ne pourront pas se refinancer, et les scale-up qui ont déjà levé rachèteront les plus faibles. De bon augure pour l’économie française.